Définir des modes de production écoresponsables dans les différents secteurs : l’éco-production et le réemploi dans les décors et la scénographie
Le fonctionnement des expositions et des scénographies dans le secteur de la culture implique souvent la création de déchets ou de l’achat de neuf dans le processus créatif. Cependant, un nombre croissant d'acteurs culturels fait aujourd’hui figure d’avant-garde en la matière, et recoure de plus en plus au réemploi et à l'éco-production.
L'éco-production et le réemploi font partie des démarches permettant de repenser la création. Leur mise en pratique nécessite cependant de poser un diagnostic clair sur l'impact environnemental des étapes successives du processus de production.
Selon l’article L541-1-1 du Code de l’environnement, le réemploi désigne « toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets sont utilisés de nouveau pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus ».
En pratique, intégrer le réemploi au processus de création nécessite de l'avoir anticipé. Comment ? En mettant en place des dispositifs dans les achats et commandes comme dans la scénographie et la programmation, la réalisation et le suivi d’inventaires, l’organisation des espaces de stockage et de production, et les partenariats locaux.
Analyser les étapes de la production, pour mieux anticiper et cibler les actions à mettre en place, c'est possible ! Des outils existent afin d'accompagner les acteurs culturels dans leur démarche : retrouvez les ci-dessous, dans la partie "Ressources supplémentaires".
Interroger la création sous l'angle de l'économie circulaire
Les principes de l'économie circulaire appliqués au secteur culturel
L'économie circulaire peut être une notion très utile pour repenser les différentes étapes de la création culturelle, de sa diffusion; et plus largement interroger l'impact de nos pratiques culturelles.
Dans son guide sur l’économie circulaire des lieux culturels, la Ville de Paris préconise ainsi :
- De développer la sobriété (en matériaux et consommation), en lien avec les artistes, des scénographies et spectacles
- De produire des matériels scénographiques démontables pour faciliter la réutilisation ou le recyclage des éléments, et éviter d’avoir un principe constructif à usage unique
- De promouvoir l’approvisionnement en matériels d’occasions, nécessitant en amont d’identifier les lieux où se procurer en biens de réemploi. Il faut aussi utiliser des matériaux intégrant une part de matière recyclée
Télécharger le guide sur l'économie circulaire de la ville de Paris :
Enfin, recyclage n'est pas seulement synonyme de tri ! Pensez à interroger vos prestataires sur leur façon de gérer leurs déchets, exiger que les matériaux soient redirigés vers des acteurs du réemploi, voire demander un suivi des quantités de déchets évacuées et du traitement associé.
L'éco-production et le réemploi en pratique
Dans le domaine des expositions, galeries, foires etc., des projets concrets commencent à éclore dans un secteur où les évènements éphémères engendrent parfois du gaspillage important.
Les actions menées partent souvent de gestes simples : réduction au strict nécessaire des impressions papier, remplacement des cartons d’invitation par des e-mails, limitation de l’emballage plastique au profit de textiles réemployés ensuite, filtres à eau pour remplacer les bouteilles en plastique...
Le secteur de l’événementiel et des musées n’est pas exempt de mesures à mettre en place non plus. Pour des événements ponctuels, The Shift Project recommande la diminution des volumes de bois utilisés et l‘augmentation des volumes de matériaux issus du réemploi, ainsi que l’abandon des matériaux trop carbonés (moquette non recyclable, coton gratté...).
En résumé, voici quelques objectifs à garder en tête lors du processus de création :
- L’anticipation : chaque achat doit se faire en gardant en tête la réutilisation potentielle des matériaux utilisés à la fin de l’exposition.
- Utiliser la création au service d'un récit écologique : communiquer sur l’objet et son processus de création permet de mettre en avant les étapes écologiques du processus.
Un exemple en pratique : l'éco-production appliquée au secteur du livre
Identifier les étapes de production et les acteurs à mobiliser
Les différentes étapes de la production et de la diffusion du livre peuvent être repensées, en engageant une grande diversité d’acteurs : le papetier, l’imprimeur, la librairie, le bibliothécaire, l’auteur, l’éditeur, le distributeur. Ces acteurs, s'ils ont des fonctions différentes selon les secteurs, restent exhaustif de la pluralité d'acteurs auxquels sont confrontées les structures culturelles dans leur processus de création.
De la conception, à l’impression et le façonnage, la promotion, la diffusion, et la distribution, toutes les étapes de la fabrication et de la diffusion du livre sont consommatrices de ressources et émettrices de gaz à effet de serre. Des actions pour réduire l'impact environnemental du secteur du livre peuvent donc être mises en place à chaque étape.
Les bonnes pratiques du Syndicat national de l'édition
Le Syndicat national de l’édition dans sa « Charte environnementale de l’édition de livres » a identifié des bonnes pratiques en matière d'édition :
- Éco-conception du point de vue matériel
- Papier : certifié ou recyclé dès le bon de commande
- Empreinte carbone du papier
- Impression et façonnage : choix d'imprimeurs plus proches, et certifications
- Promotion : réfléchir à des PLV éco-responsables
- Gestion des stocks : repenser le processus de tirage
- Transport : distribution, le recyclage, et diminution du plastique
Pour en savoir plus sur la façon dont l'industrie du livre est concernée par l'écologie, vous pouvez poursuivre votre lecture sur notre page "Repenser l'industrie du livre".
Initiatives & bonnes pratiques
L'Augures Lab Scénogrrrraphie est un programme collaboratif pour penser l’éco-scénographie dans le champ du spectacle vivant et de l’exposition. Il vise à faire collaborer des professionnels sur ces sujets et leurs projets, l'enjeu étant de les faire monter en compétences pour qu'ils puissent éco-concevoir plus facilement.
Le site internet du réseau national des ressourceries et recycleries propose un moteur de recherche cartographié de l’ensemble de ses structures en France.
Le projet est une plateforme mettant en relation des personnes qui n’ont plus l’utilité de décors, mobiliers, costumes ou matériels techniques avec des professionnels ou particuliers en vue d’une seconde vie dans leurs productions.
La totalité des matériaux de l’exposition et de scénographie ont été récupérés pour être réemployés au sein du CMN. Dans le cadre d'Alternatives Vertes la Réserve des Arts a reçu un financement afin de consolider et d'accroître son impact en amplifiant les actions qu’elle déploie déjà au profit de l'économie circulaire dans le domaine des arts, en accentuant notamment son action envers les professionnels. En IDF et en PACA, l’objectif est de faire avancer les bonnes pratiques de réemploi en : augmentant la circularité des matériaux de réemploi via le développement de la communauté d'adhérents et de la connaissance des matériaux, mesurant l'impact social et environnemental de la structure, expérimentant les bonnes pratiques auprès de l'antenne sud en Région PACA pour tester une première réplication de l'action hors d’IDF, partageant des éléments de contenu avec le Réseau national des ressourceries artistiques et culturelles (RESSAC) pour une diffusion élargie de la solution.
Le projet financé par Alternatives Vertes, vise à développer plus amplement le modèle de Récupérathèques déjà existant, en fédérant les différents acteurs présents sur le territoire, et en impulsant des recherches et des expérimentations supplémentaires autour de la création par le réemploi au sens large. Le projet contribuera ainsi à : pérenniser et faciliter le modèle existant grâce à des outils numériques (une web App, « Mycélium » et une plateforme partagée, « Récupédia ») et favoriser la recherche autour de l'éco-conception et la création par le réemploi, et diffuser les expérimentations dans un cycle de conférences.
La Ressourcerie du cinéma, située en Ile-de-France, se donne pour mission de sauver les décors de cinéma avant qu’ils ne deviennent des déchets et de les proposer au réemploi à travers un catalogue accessible en ligne. Ils peuvent ensuite être achetés ou loués. Dans le cadre d'Alternatives Vertes, la Ressourcerie du Cinéma (LRDC) a reçu un financement pour améliorer sa gestion : du réemploi et du recyclage d'éléments de décors du cinéma, avec de la location et de la vente de matériaux ; de la location d'espaces de pré-montage et de stockage ; des offres de formation et un petit laboratoire de recherche.
La Ressourcerie du spectacle propose le même type de service que celle du cinéma mais à destination de professionnels du spectacle vivant. Dans le cadre d'Alternatives Vertes la Ressourcerie du spectacle a reçu un financement afin de consolider ses activités de collecte, de revalorisation et de soutien technique à l'organisation d'évènements ; revaloriser ses activités de recherche & développement ; créer un module de collecte opérationnel pour l'ERP Dolibarr.
Dans le cadre d'Alternatives Vertes, la Ressourcerie culturelle a reçu un financement afin de développer des solutions innovantes en faveur de l’économie de la fonctionnalité (objectif : remplacer la notion de vente du bien par celle de la vente de l’usage du bien), afin d’améliorer la gestion des matériels et matériaux employés dans les secteurs de la culture et de l’événementiel. Le projet se décline en quatre actions : la location de matériaux et matériels,
l’amélioration et l’optimisation des biens dans une logique d’éco-conception, la mise en partage de biens (mutualisation) , l’application d’une politique d’investissements communs, avec notamment des achats groupés.
Artstock est une ressourcerie installée en Occitanie qui collecte et revalorise les matériaux de théâtre et de l’évènementiel. La plateforme insiste sur le développement d’une économie circulaire au sein du spectacle vivant. Dans le cadre d'Alternatives Vertes, ArtStocK a reçu un financement dans l’optique de structurer son activité de surcyclage pour accélérer la valorisation de la matière, en utilisant le réemploi comme levier d’insertion par l’activité économique. L'objectif est de faire d’Artstock un outil du territoire dédié : à la promotion de l’ESS avec la valorisation des matériaux et au déploiement d’actions d’insertion professionnelle dans son atelier.
Dans le cadre d'Alternatives Vertes, le projet a reçu un financement pour la création d'un espace permettant la collecte, l’expérimentation, l’innovation et la création dans le domaine des arts visuels à partir des chutes de production des entreprises et artisanats locaux. Investie par les étudiants, les professeurs de l’école et par des publics extérieurs, la Chutothèque TALM vise à être à la fois un magasin-atelier, un centre de ressources et un lieu d’exposition.
Les cartels étaient écrits à la main. Des sacs poubelles montraient les déchets engendrés par la création de l’exposition.
Elle a été totalement conçue en réemploi des anciennes expositions de La Villette. Elle rassemblait les créations des jeunes diplômés des plus grandes écoles d'arts en mode.
Le Centre Juno Beach, d'un nom d'une des plages du Débarquement, a réutilisé du mobilier de son ancienne exposition (vis, attaches, vitrines, meubles, panneaux de bois) pour économiser entre 4 à 5 stères de bois, et aussi permis l’utilisation de matériaux plus responsables pour certains éléments (kakémonos en papier recyclé, panneaux en carton recyclé), sans impression couleur, et le passage par des prestataires responsables écologiquement comme Imprim’Vert.
Le musée a réalisé une étude sur l'ensemble de ses déchets et intégré dans certains cahiers des charges d’expositions l‘obligation du réemploi des cimaises et des décors scénographiques.
L’Opéra de Lyon a organisé une vente ouverte au public de milliers de costumes utilisés dans ses anciens spectacles. En outre, dans le cadre du projet de financement des Investissements d’avenir Alternatives Vertes, il se coordonne avec le Festival d'Aix-en-Provence, l’Opéra National de Paris, le Théâtre du Châtelet et le Théâtre royal de la Monnaie à Bruxelles pour expérimenter des structures standards de décors. La démarche illustre une voie d’éco-conception : calculateur des intrants (matériel, origine des bois…), procédés de transformation, avec mesure de l’impact sur les tournées (quel volume utile à transformer) ; des extrants (déchets) : tout est dévissé et réutilisé. D’autres compagnies tournent à vélo (très faible impact par festivalier). Le projet consiste en 4 types d'activités : mise en œuvre de solutions standards dans la construction d’éléments constructifs de décors, évaluations, documentation (sur les impacts organisationnels, managériaux et humains, et le processus du projet), dissémination et communication.
Ce festival est organisé avec un maximum de matériel d’éco-récupération. Il mutualise, avec d’autres festivals, des gobelets floqués communs, que les spectateurs conservent, promeut les mobilités douces en organisant un challenge vélo, en mettant en place des partenariats avec les réseaux de bus locaux...
Le recyclage des déchets peut être favorisé dans le domaine de l’audiovisuel. La série Le Baron noir a ainsi mesuré son impact, en faisant appel à un prestataire de service, faisant l’économie lors de son dernier tournage de 21.000 gobelets et 9.000 capsules de bouteilles.
Art of Change 21 relie l’art et les grands enjeux environnementaux. Depuis sa création à Paris en 2014 dans la perspective de la COP21, l’association met en valeur le rôle des artistes et de la créativité comme accélérateurs de la transition écologique. Elle agit à l'échelle internationale, et publie un blog et une lettre d’information sur l’art et l’écologie. La plateforme propose aussi des objets ou matériaux dont les musées, galeries et autres structures n’ont plus l’utilité, permettant de désencombrer les réserves sans pour autant jeter, et de trouver via la plateforme les dons d’autres établissements pour éviter l’achat de neuf et les coûts écologiques et financiers qui en découlent.
Les bibliothèques parisiennes ont lancé en 2021 un lot au sein de leurs marchés de mobilier pour du mobilier en réemploi.
Dans le cadre d'Alternatives Vertes, MPO France a été financé pour développer un service de gestion de la fin de vie des stocks de produits voués à la destruction (notamment les produits des labels, maisons de disques, éditeurs vidéo, éditeurs de logiciels de loisirs et de leurs distributeurs) - le tout de façon écoresponsable. C’est également un projet de recherche et de développement sur deux axes visant à réduire l’empreinte écologique des disques vinyle par le réemploi de la matière vinyle pour produire de nouveaux disques, la réduction de l’utilisation du PVC pétrosourcé en lui instillant une dose de matière biosourcée renouvelable.
Dans le cadre d'Alternatives Vertes, l'entreprise a été financée pour poursuivre son projet d'enceintes éco-conçues et indépendantes en énergie grâce à des panneaux solaires intégrés. Les enjeux liés au financement relevaient principalement de l'accroissement de la force commerciale et de la production pour démocratiser ces solutions sur un marché en mutation. Il s'est agi en particulier de financer : des postes, la participation à des salons professionnels et des actions marketing ou promotionnelles, la production de machines dédiées aux partenaires, l'amortissement des outils de production, une analyse de cycle de vie (ACV) des solutions et une certification type AFNOR.
Acteurs de la filière événementielle engagés dans des démarches d’écoconception sur le territoire de la Métropole nantaise et de la région Pays de la Loire. Leur réseau dispense des ressources en ligne gratuites, organise une rencontre annuelle, anime des groupes de travail, informe sur les formations disponibles, organise des journées d'études nationales "Territoires d'événements responsables" et anime un label "événement éco engagé".
Le palais des Beaux-Arts de Lille s’est engagé dans la transition écologique et a partagé un guide afin de décrypter la façon dont ces efforts ont pu être mis en place. Il rappelle les grandes actions importantes à réaliser dans l’éco-conception : repenser, réduire et remplacer en amont, et réutiliser, recycler et réparer en aval.
Cette association créée par des acteurs du secteur de la mode, s'engage à la mise en place d'actions concrètes dans le secteur pour une mode plus responsable. Elle se compose de groupes de travail, et organise des évènements. Elle dispose aussi d'une boite à outils (auto-diagnostic, actualités, rapports, études, guides pratiques, webinars, podcasts…) sur son site internet.
Ce festival de autour du cinéma, des arts et des sciences vise à élaborer de nouveaux scénarios qui préservent le bien commun, à travers la présentation de projections, des rencontres, des échanges, des tables rondes et conférences, des expositions, des ateliers, des spectacles, des concerts, des parcours scolaires... L'objectif ? Faire se rencontrer des acteurs du secteur pour repenser les modes de production.
Cette association vise à aider les acteurs de la musique, et en particulier les DJ, à participer à des événements plus éco-responsables, avec l'utilisation de drivers 0 plastique par exemple.
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