Maîtriser les impacts écologiques de l'offre culturelle numérique avec l'écoconception
Web 3, visites virtuelles, dématérialisation des collections… nos pratiques et le fonctionnement des structures culturelles se transforment avec les innovations numériques. Pourtant, l'impact environnemental du numérique est important, et croissant. L'écoconception est une démarche très utile pour se poser les bonnes questions face au numérique, et l'utiliser à bon escient.
Les impacts de l'offre numérique culturelle
Streaming et numérisation des activités culturelles: deux tendances structurelles
Deux tendances récentes modifient le travail des structures culturelles : du côté de l'offre, la multiplication des plateformes de flux (streaming) de contenus culturels, vidéo en particulier ; et du côté de la gestion des structures culturelles, une part de plus en plus importante du travail qui s’effectue numériquement.
De plus en plus de collections et d'œuvres sont numérisées et disponibles en ligne, les processus administratifs sont dématérialisés… sans oublier la production et post-production audiovisuelles, faites très largement grâce à des outils numériques.
Un impact environnemental difficile à évaluer, mais croissant
Le numérique du secteur culturel et ses impacts sont aujourd’hui un enjeu écologique. En France, le numérique représenterait 2,5% de l'empreinte carbone nationale. A l'échelle mondiale, la vidéo représenterait 60% du trafic web mondial et l’empreinte carbone du streaming compterait pour 1% des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale (rapport du Shift Project de 2019).
Les émissions de gaz à effets de serre mondiales (GES) du numérique sont en croissance très rapide, à rebours de la maîtrise croissante des émissions de GES dans la plupart des autres activités économiques.
Une diversification de l'offre et des pratiques numériques
En parallèle, les formes de l'offre numérique se diversifient. Le « web 3 » qui s'appuie sur des technologies récentes comme la chaîne de blocs (blockchain), les jetons non-fongibles (NFT) ou encore le métavers, se développe progressivement dans le monde culturel. Il en va de même de l'intelligence artificielle, dont les techniques suscitent un intérêt croissant. Les impacts environnementaux de ces différentes technologies ne sont pas encore toutes étudiées, mais certaines sources estiment qu'un seul bitcoin aurait une empreinte de 169 tonnes de CO2.
L'étude en 3 volets sur l'impact du numérique en France, menée conjointement par l'ADEME et l'Arcep, et dont les conclusions ont été rendues entre 2022 et 2023, est particulièrement utile pour comprendre l'impact environnemental du secteur du numérique. Ainsi, en France, où l'énergie est majoritairement décarbonée, la phase d'usage représente 21% de l'impact environnemental du numérique, contre 78% pour la phase de fabrication.
Plus d'informations sur le déploiement de la sobriété numérique dans la gestion des structures culturelles sur notre page dédiée
Afin de maîtriser les impacts de l'offre numérique culturelle, il est donc nécessaire d'interroger systématiquement nos besoins en termes de pratiques numériques.
Connaître l'impact du numérique, pour l'utiliser intelligemment et éviter les effets rebond
Le numérique est indéniablement attractif pour le secteur culturel : il peut permettre de toucher d'autres publics, ou créer d'autres pratiques culturelles. Il peut, sous certaines conditions, éviter des pratiques culturelles à plus forts impacts écologiques (par exemple une visite virtuelle en lieu et place d'un déplacement en avion fortement émissif de gaz à effet de serre). Il importe, néanmoins de connaître les impacts du numérique et d'éviter les risques d'« effets rebond ».
Qu'est-ce que "l'effet rebond" ?
L'effet rebond, autrement appelé "Paradoxe de Jevons", désigne l'augmentation de la consommation, à la suite de la réduction des limites liées à l'utilisation d'une technologie.
Ici, il désigne concrètement les impacts écologiques nouveaux engendrés par les nouvelles pratiques numériques, ou par l'intensification de l'utilisation du numérique permise par les avancées technologiques.
En résumé, des avancées qui permettraient d'optimiser l'utilisation des ressources et donc de réduire les émissions du numériques créent finalement de nouvelles pratiques, dont les impacts s'ajoutent à ceux des pratiques existantes, qui ne disparaissent pas.
Ecoconcevoir l'offre culturelle numérique
Il est essentiel d’intégrer les impacts environnementaux du numérique dans la réflexion sur les nouveaux services numériques, notamment grâce à l'écoconception, qui demande une réflexion globale sur l’usage du numérique et ses impacts écologiques.
Il est ainsi indispensable de se poser la question de la raison d’être du service numérique, et de sa pertinence pour répondre à un objectif donné. L’existence du service est elle vraiment nécessaire ? Peut on faire autrement que développer une solution numérique ? Une alternative non numérique du service est-elle envisageable ou même préférable ?
Si le service ne peut être rendu qu'avec le numérique, il faudra veiller à limiter les impacts écologiques du service, notamment en veillant à ne pas entraîner le renouvellement du matériel de la structure culturelle ou des futurs utilisateurs du service en question. Il faudra également veiller à réduire au maximum le transfert de données, éviter des consommations électriques importantes...
Quelques outils à votre disposition
Un référentiel d'écoconception a été conçu dans le cadre de la mission interministérielle « Numérique écoresponsable » de la Direction Interministérielle du Numérique, en collaboration avec l’Institut du Numérique Responsable (INR).
EcoInfo a rédigé un guide proposant des critères qui permettent de qualifier, voire de quantifier pour certains, les impacts d'un projet en intelligence artificielle.
Ecoindex est quant à lui un outil proposé par GreenIT pour évaluer la performance écologique d'une page web, selon plusieurs mesures (classement, impacts environnementaux associés, empreinte « technique »...).
Retrouvez plus d'outils et de guides sur notre Centre de ressources.
Initiatives & bonnes pratiques
Dans le cadre de l’appel à projet Alternatives vertes soutenu par le Secrétariat général pour l'Investissement et le ministère de la Culture, Qarnot Computing a reçu un financement pour son projet de faire face aux efforts encore balbutiants pour réduire l'impact carbone du secteur de l'animation et des VFX, avec un modèle de centre de données géo-distribué et bas-carbone. Qarnot propose ainsi une offre de poste de travail/infrastructure à faible empreinte environnementale basée sur l'informatique en nuage (cloud), adaptée aux besoins et aux attentes de la filière animation et VFX, d’abord en France puis en Europe. Cette solution opérationnelle sera mesurable, et elle permettra à la filière de décarboner ses activités sur la partie informatique et cloud.
La BnF a mutualisé les moyens alloués au développement de Gallica, sa bibliothèque numérique, et fait bénéficier ses partenaires de son savoir-faire en proposant une offre de bibliothèque numérique en marque blanche.
En savoir plus sur le site de la BnF
Dans le cadre de l’appel à projet Alternatives vertes, le projet accueillera au moins 20 studios de développement de jeux vidéo français, de toute taille et en provenance de tout le territoire pour produire les outils d’aide à la décision à destination des entreprises pour leur permettre d'inventer et de déployer de nouvelles méthodes de production à impact environnemental réduit, et de diffuser largement ces outils pour les rendre accessibles à toute la filière française.
En savoir plus sur le site de Game Only
Cette association collecte les informations de consommation électrique des studios d’animation grâce à un protocole consistant à mesurer sur une semaine avec un wattmètre la consommation électrique des équipements liés à la production. Ce traitement des données permettra d'établir un schéma offrant une vision plus précise de la consommation électrique en production.
En savoir plus sur le site de la Cartouch'Verte
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