Favoriser la mutualisation et l’allongement de la durée de diffusion des spectacles et des expositions
Favoriser la mutualisation et l’allongement de la durée de diffusion des spectacles et des expositions est une piste pour engager la transition écologique dans la culture. Repenser les tournées ou la circulation des œuvres et des artistes, et partager, sont autant de moyens concrets pour changer de paradigme.
Les tournées de spectacles, les expositions, ou les grands événements liés à la mode (« fashion weeks ») engendrent de nombreux trajets : pour les œuvres, les artistes, ou les techniciens.
Les voitures, poids lourds ou avions utilisés ont un impact environnemental significatif. En cause : les émissions des moteurs, les particules fines (nocives pour notre santé)… Le conditionnement des œuvres ou du matériel technique est lui aussi générateur de déchets.
Les transports représentent environ un tiers des émissions de gaz à effet de serre en France : c'est le premier facteur d'émissions de gaz à effet de serre à l’échelle du pays.
Le transport d’œuvres d’art, dit « convoiement », ou d'artistes et de leurs équipes, est donc lui aussi émetteur de gaz à effet de serre. Or, à l'échelle nationale, il s'effectue encore majoritairement en voiture ou en camion.
A savoir
Sur l’année 2009, les kilomètres parcourus par les convoyeurs pour les expositions de la Réunion des musées nationaux et du Grand Palais (RMN-GP) étaient équivalents à 31 fois le tour de la Terre (chiffre établi par The Shift Project).
C’est aussi le cas pour le spectacle vivant. Toujours selon The Shift Project, un festival de 4 jours rassemblant 280.000 spectateurs en périphérie d’une ville émet 4.620 tonnes CO2e du fait du déplacement des artistes, des techniciens, et du matériel musical. C’est le quart de l’impact du festival, et l’équivalent des émissions de gaz à effet de serre d’environ 630 Français sur une année complète.
Alors, que faire ? Il y a beaucoup à faire pour diminuer l'impact environnemental des déplacements des artistes, des équipes techniques et du convoiement; mais surtout beaucoup à gagner : une dépendance moindre aux énergies fossiles, et une culture toujours plus accessible.
Changer de paradigme, pour une culture plus accessible
Des évènements toujours plus grands et plus fréquents, mais des ressources limitées
De nombreuses filières culturelles ont tendu, sur la période récente, à multiplier les événements courts et ponctuels.
Perçu comme gage de dynamisme, ce fonctionnement pose des vraies questions écologiques et expose l'ensemble du secteur à une contrainte forte. En effet, le prix à la hausse des énergies fossiles pèse sur la capacité à maintenir ce modèle dans la durée, sans parler de l'impact environnemental de ce fonctionnement.
Des solutions en pratique : opter pour les mobilités douces et mutualiser
Les mobilités douces, comme le train, le covoiturage, la mutualisation du convoiement sont autant de moyens de limiter les émissions de GES et la dépendance aux énergies fossiles.
Une autre piste est de favoriser l’allongement de la durée de diffusion des spectacles et des expositions, avec plus de dates au même endroit.
Enfin, la mutualisation sur une base locale ou régionale, par une meilleure coordination entre structures culturelles voisines, a déjà fait ses preuves.
Le bénéfice écologique est clair : il permet d’éviter les déplacements successifs de personnes, le transport et l’installation/désinstallation de matériel.
Une telle évolution pose néanmoins des questions fondamentales du point de vue de l’accès de toutes et tous à la culture, partout sur le territoire. Le ministère de la Culture, qui souhaite encourager ce changement, veille donc à ce qu’il ne se fasse pas au détriment de la liberté de la création ou de la diversité culturelle.
Il faut désormais encourager et maîtriser un changement de paradigme sur le rapport à la culture comme élément d’attractivité, au niveau des territoires et au plan national.
Des pistes de travail, à différentes échelles
Ce changement de paradigme pourrait amener à :
- Une optimisation du circuit des œuvres ou des artistes, ce qui implique une bonne coordination entre structures culturelles à l'échelle régionale et locale
- Augmenter le nombre de représentations ou la durée d’exposition
- Réduire les événements temporaires ou uniques
- Favoriser une re-création par une équipe locale plutôt qu’une tournée nationale ou internationale
- Mutualiser la production, les tournées, les expositions, les diffusions entre plusieurs partenaires locaux ou situés sur un même parcours de création
- Mutualiser les éléments utiles à la production : le matériel technique, les moyens logistiques, des éléments de structure, de la vaisselle pour le catering, des commandes communes, par exemple auprès de catering végétariens
- Privilégier les modes de transports décarbonés, en limitant l’avion et la voiture
Pour vous accompagner et vous inspirer
Vous pouvez retrouver dans notre centre de ressources, des guides et des outils, afin de favoriser l'allongement de la durée de diffusion des évènements culturels, et recourir davantage à la mutualisation.
Par exemple, les États généraux des festivals (EGF) ont créé en commun avec le ministère de la Culture des engagements à travers une charte des festivals plus éco-responsables.
Exemples d'initiatives & bonnes pratiques
Le Musée des Confluences évènementialise régulièrement ses collections permanentes pour maintenir son attractivité sans dépendre d’un rythme trop rapide de renouvellement de ses collections temporaires.
Ils ont par exemple produit une note de service en faveur du "ralentissement" à travers la réduction du nombre d’expositions temporaires.
L’Office national de diffusion artistique et la Région Centre-Val-de-Loire ont mis en place un dispositif de soutien à la diffusion des spectacles afin que ceux-ci connaissent une durée de vie plus longue que la normale. À travers ce soutien financier porté par la Scène O Centre, les spectacles augmentent leur durée de vie de 2 ans (passant de 1 à 3 ans). Ce dispositif permet ainsi aux spectacles concernés de toucher un public plus large.
Le chorégraphe a décidé que ses spectacles ne tourneraient plus en avion. Une fois un spectacle créé en France, sa tournée européenne est assurée en train. Pour favoriser la diffusion de ses œuvres à l'échelle internationale, le chorégraphe créé également un « livret numérique » pour permettre une recréation de ses spectacles à l’étranger. Par exemple, son spectacle « Isadora Duncan » a été recréé parallèlement en Europe et en Amérique du Nord, par des compagnies locales.
Cette compagnie produit des créations contemporaines, transdisciplinaires et collaboratives. Son spectacle ONIRI 2070, né après une tournée assurée à la voile, est un spectacle pensé pour consommer moins de 1000 watts et utilise principalement des vélos pour ses déplacements.
Dans le cadre d'Alternatives Vertes, Zic Ethic a été financé pour favoriser la diminution d’achat neufs au sein de la chaîne de valeur de production d’instruments de musique, en créant des synergies avec tous les acteurs de la filière musicale via une plateforme. Le projet vise ainsi à diminuer les ressources utilisées pour fabriquer les instruments et l’impact environnemental lié à l'importation, et créer un regain d’activité pour les artisans luthiers et réparateurs d’instruments de musique français.
Dans le cadre d'Alternatives Vertes, ce projet a été financé pour proposer un modèle de tournées dont l’impact environnemental serait pratiquement neutre, et ainsi parvenir à produire et diffuser un enregistrement sonore bas-carbone. Il a pour but que deux artistes parcourent les massifs du Parc des Écrins à pied, accompagnés d’un guide de moyenne montagne, et se produisent chaque soir dans un refuge ou une salle de concert, en utilisant l’énergie solaire stockée durant leur journée de marche. Pendant la tournée, ils effectueront une session d’enregistrement dont le matériel sera entièrement alimenté par l’énergie solaire, et qui sera rendue disponible uniquement en version dématérialisée.
Cette association compte un réseau de 200 adhérents, et cherche à former à la transition écologique tous les acteurs de la musique électronique, en particulier pour la tenue d'événements ponctuels.
Le CNC invite les bureaux d’accueil des tournages à encourager une production plus durable et responsable des films, en s’appuyant sur leur maillage territorial.
L’exposition Goya a misé sur une expérience immersive avec un cahier des charges contraint et peu d’emprunts d’œuvres, et la réalisation d’un bilan carbone de l’exposition. Le bilan a été de 44 tonnes CO2eq, l'équivalent des émissions de GES annuelles de 4 français.
Télécharger le Guide pratique d'écoconception du Palais des Beaux-Arts de Lille
La charte « Partenaires culturels du Grand Ouest » réunit 40 lieux culturels du territoire, permettant la suppression de la clause d’exclusivité territoriale et l’optimisation des tournées d’artistes.
Le Grand Théâtre d’Angers et le Théâtre Graslin de Nantes se sont réunis pour créer « Angers Nantes Opéra ». De la même manière les scènes nationales de Besançon, Dunkerque, Quimper, Compiègne, Rennes, et Tourcoing se sont regroupées dans la Co[opéra)tive pour mutualiser la diffusion de productions lyriques sur l’ensemble du territoire local.
L'ensemble assure ses tournées d’été à vélo, à l'échelle d’une région.
Ce projet coordonné par la scène de musiques actuelles Le Périscope à Lyon, et financé par Alternatives Vertes, vise par une coopération locale entre scènes et festivals, à réduire leur empreinte carbone, notamment liée aux déplacements des artistes et des tournées. C’est un programme européen collaboratif pour aider les acteurs de la musique à faire face aux challenges économiques, écologiques et sociaux.
Climate Neutral Now encourage les organisations à s'engager à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, avec une approche en quatre étapes : mesurer, réduire, signaler et contribuer. Plus de 400 organisations y participent. Leur participation est formellement reconnue par les Nations Unies.
Ce site internet regroupe un exemple de démarches faites dans les musées en Suisse qui peuvent être inspirantes pour la France.
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